ALBAN DE HALLER

Biographie

Françoise Jaunin

Il était à la fois solaire et ténébreux, turbulent et hyper sensible, curieux de tout, généreux et follement exigeant. Né à Lausanne le 25 octobre 1979, Alban de Haller était architecte, un métier qui exige et englobe des compétences plurielles – à la fois créatives et techniques, scientifiques et sociologiques – et une vision du monde et de
la société. Un choix qui n’a rien d’étonnant chez un jeune homme qui, en plus de sa vocation de bâtisseur, cultivait des intérêts au grand angulaire pour les sciences et les arts. N’avait-il pas pour ancêtre l’illustre médecin, scientifique et naturaliste du Siècle des Lumières Albert de Haller dont il partageait les initiales ?

Dans la constellation de ses passions, la peinture tenait une place encore cachée mais fondamentale. Comme l’architecture mais loin des contraintes économiques, politiques ou juridiques inhérentes à l’art de construire, elle lui permettait de mener en direct et en toute liberté ses explorations et ses réflexions philosophiques, existentielles et formelles sur le sens de la vie et la marche du monde. Avec la créativité exacerbée et l’engagement forcené qui étaient les siens, avec son besoin constant de repousser les limites toujours plus loin et dans l’oscillation constante de sa nature ambivalente, entre amour exubérant de la vie et mélancolie profonde.

En marge de sa scolarité – Collège de Beausobre à Morges (latin-grec), Gymnase de Morges (latin-anglais) puis École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) dont il sort en 2008 avec un Master of Arts en Architecture avec une thèse sur la construction en paille qui affiche ses préoccupations écologiques-, il accomplit des petits boulots qui représentent autant d’expériences de vie : stages d’employé de banque, de vendeur marketing, de plâtrier-peintre, de thérapeute ou de prof d’arts visuels. Son diplôme d’architecte en poche, il rejoint d’abord l’Atelier Mangeat à Nyon, puis l’Atelier Mestelan à Lausanne et l’Atelier Bonvin à Martigny, grâce auxquels il touche à des domaines constructifs très divers : d’un concours pour une halle militaire à la réhabilitation d’un quartier urbain, d’un collège à une policlinique médicale universitaire ou une clinique privée, d’un immeuble administratif à des villas. Un commencement de carrière d’architecte et un début de trajectoire de peintre, aussi fulgurant que secret, qui s’arrêtent brutalement et bien trop tôt avec sa mort cinq ans plus tard.

« L’homme informationnel ultra-connecté vit plus seul que jamais et se meurt de solitude, écrivait-il dans ses notes. Avec pour fondement une forme d’utopie, l’art doit offrir du sens. L’artiste est devenu un pilote des forces du chaos qu’il tente d’orienter dans une direction ou dans une autre. Le chaos pourvoyeur de formes et de surprises sans fin, de jeux allant de l’échelle microscopique aux confins de l’univers : et nous voilà en lien avec ce qui nous dépasse tous, nous qui avons perdu tout sens à nos existences » .